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Le château de Dracula au cœur des Carpates : la citadelle de Poenari
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Marché Médiéval de Noël à Provins – Rois Mages et troubadours animent banquet et bal d’époque
Médina de Tunis – 700 monuments au milieu des souks
Posté le Mardi 25 mai 2010dans Médieval, Pays, Tunisie, UNESCO, villagepar Alexandre RosaImprimerSous le règne des Almohades et des Hafsides, du 12ème au 16ème siècle, Tunis a été considérée comme l’une des villes les plus importantes et les plus riches du monde islamique. Quelque 700 monuments dont des palais, des mosquées, des mausolées, des medersa et des fontaines témoignent de ce remarquable passé qui font que sa médina est inscrite au Patrimoine Mondial de l’UNESCO depuis 1979.
Fondée en 698 autour du noyau initial de la mosquée Zitouna, elle développe son tissu urbain tout au long du Moyen Âge, vers le nord et vers le sud, se divisant ainsi en une médina principale et en deux faubourgs au nord (Bab Souika) et au sud (Bab El Jazira). Devenue capitale d’un puissant royaume à l’époque Hafside, foyer religieux et intellectuel et grand centre économique ouvert sur le Proche-Orient, le Maghreb, l’Afrique et l’Europe, elle se dote de nombreux monuments où se mêlent les styles de l’Ifriqiya aux influences andalouses et orientales mais qui empruntent également certaines de leurs colonnes ou leurs chapiteaux aux monuments romains ou byzantins.
Avec une superficie de 270 hectares et plus de 100.000 habitants, la médina représente le dixième de la population tunisoise et le sixième de la surface urbanisée de l’agglomération.
L’urbanisme de la médina de Tunis a la particularité de ne pas obéir à des tracés géométriques ni à des compositions formelles (quadrillage, alignements, etc…). L’organisation complexe du tissu urbain a alimenté toute une littérature coloniale où la médina dangereuse, anarchique et chaotique semblait le territoire du guet-apens. Pourtant, des études entamées dans les années 1930 avec l’arrivée des premiers ethnologues a permis de démontrer que l’articulation des espaces de la médina n’est pas aléatoire : les maisons s’articulent de manière socioculturelle, codifiée selon les types complexes des rapports humains. De nombreuses publications ont détaillé le modèle de développement de la médina et le système de hiérarchisation des espaces collectifs et privés, résidentiels et commerciaux, sacrés et profanes. On peut relever des axes nord-sud et est-ouest assimilables à un cardo et un decumanus romains qui s’entrecoupent au niveau de la cour de la mosquée Zitouna, foyer de prière et d’étude. On distingue ensuite les rues principales, les rues secondaires (équipements de quartier) et les impasses (venelles), ensemble de parcours privés parfois réservés aux femmes.
Le domaine bâti est caractérisé en général par l’accolement de grandes parcelles (600 m² environ) et la mitoyenneté. Il s’en suit un enclavement des lots et des bâtiments les plus éloignés du réseau viaire principal, ce qui justifie les ruelles et impasses d’accès établies par cession ou droit de passage. Une disposition juridique octroie “la propriété de l’air” et permet l’édification de construction formant une voûte sur l’espace de la voie publique sous réserve qu’il n’en résulte aucun dommage pour les passants. Il est d’usage que la hauteur de la voûte permette le passage sans encombre d’une charrue chargée. Architectures domestiques (palais et maisons bourgeoises), officielles et civiles (bibliothèques et administrations), religieuses (mosquées, tourbas et zaouïas) et de services (commerces et fondouks) présentent une grande porosité malgré un zonage clair entre les commerces et l’habitation. Les souks nobles sont situés aux abords directs de la mosquée Zitouna (parfumeurs, libraires, tisserands de soie et bijoutiers) et les souks pauvres (teinturiers et serruriers) au niveau des remparts et dans le quartier méridionale (parfois même extra-muros).
Dans le cas des architectures domestiques, plus elles sont en retrait des commerces, plus elles ont de valeur. La notion de retrait et d’intimité est donc primordiale. L’introduction tardive du réseau d’égouts induit un écoulement des eaux usées à travers les rues de la médina. Les maisons et lieux nobles sont donc toujours situées en amont ou dans les quartiers hauts (quartier de la kasbah). Les terrasses de la médina sont également un lieu important de la vie sociale.
Ce patrimoine architectural est tout aussi omniprésent dans les maisons de particuliers et les petits palais des personnalités officielles que dans le palais du souverain à la kasbah. Toutefois, rares sont les palais et demeures qui remontent au Moyen Âge, contrairement au 17ème, 18ème et 19èmes siècles qui ont légué des maisons prestigieuses telles que le Dar Othman, le Dar Ben Abdallah, le Dar Hussein, le Dar Chérif ainsi que d’autres maisons plus ou moins vastes et richement décorées dont l’inventaire des années 1970 n’en compte pas moins d’une centaine.
On dénombre également plusieurs palais élevés par les beys ou des membres de leur entourage dans la banlieue de Tunis et ce depuis le 13ème siècle. Les principaux palais des beys sont ceux de La Marsa, du Bardo et de Ksar Saïd. Si l’on ajoute les mosquées et oratoires (environ 200), les médersas (El Bachia, Mouradiyya, Slimania, El Achouria, Bir El Ahjar, El Nakhla, etc…), les zaouïas (Sidi Mahrez, Sidi Ali Azouz, Sidi Abdel Kader, Sidi Brahim Riahi, etc.), les kouttabs, les tourbas (Tourbet El Fellari, Tourbet Aziza Othmana et Tourbet El Bey) et les portes, le nombre des monuments de Tunis approche les 600 dont 98 ont été classés depuis 1912.
Car, au contraire d’Alger, Palerme ou Naples, son cœur historique n’a en effet jamais souffert de grandes catastrophes naturelles ou d’interventions urbanistiques radicales. Les principaux outrages qu’a subi la médina remontent à l’époque suivant l’indépendance du pays avec la destruction de l’enceinte et la précarisation de l’habitat. C’est la raison pour laquelle la médina est inscrite en 1979 au patrimoine mondial de l’UNESCO. Au début du 21ème siècle, la médina est ainsi l’un des ensembles urbains traditionnels les mieux préservés du monde arabe.
Quelle que soit la forme d’habitat de la médina (immeuble de rapport, palais ou villa), le registre ornemental subit dès le 19ème siècle l’influence des beaux-arts (renaissance italienne et baroque). À partir des années 1900 apparaît le style néo-mauresque (arabisance) constituant une tentative de synthèse entre les qualités architectoniques locales (simplicité des lignes de construction et ornementation) et l’architecture moderne. À partir des années 1920 et jusqu’à l’indépendance, de nombreux édifices Art nouveau et Art déco voient le jour grâce à la présence d’une importance main d’œuvre italienne et maltaise. Par ailleurs, le long des boulevards crées sur l’emplacement des anciens remparts, l’apport architectural de la période 1850–1950 se fait sentir dans les bâtiments officiels, la médina accueillant neuf ministères et le siège de la municipalité de Tunis.
Mais le touriste européen appréciera surtout de la Médina de Tunis ses souks établis aux quatre coins de la ville historique. Paradoxalement, c’est aussi de cet ensemble de ruelles au sein desquels gravitent toutes sortes de rabatteurs et de charlatans que vient la possible mauvaise image de Tunis. On la dit sale, dangereuse, remplie d’hommes qui ne quittent pas les femmes étrangères des yeux, bruyante… l’idée qui ressort du récit de nombreux touristes est qu’ils n’ont pas apprécié d’être harcelé par les commerçants tunisiens installés dans cet endroit qui, reconnaissons-le, est relativement touristique. Si certains profitent en effet de la situation pour arnaquer l’étranger, d’autres sont bien honnêtes et ne font qu’appliquer les règles du commerce existant de l’autre côté de la Méditerranée. Il y convient bien entendu de négocier, mais aussi de jouer la comédie, de feindre être choqué du prix proposé, de parler fort en faisant des scènes, etc…
Ceux qui entrent dans le jeu auront la possibilité de faire de réelles affaires dans les souks de Tunis ou d’ailleurs, profitant au passage de l’extraordinaire virtuosité des artisans locaux, tout particulièrement en ce qui concerne les tapis et les œuvres de cuivre. Certaines boutiques proposent de véritables bijoux, mais encore faut-il en avoir l’utilité. C’est peut-être ce que certains vendeurs ont du mal à comprendre, persuadés que des articles de qualité ne peuvent pas recevoir un “non”. Ils rivalisent en tout cas d’ingéniosité pour attirer le touriste dans leur échoppe, notamment en leur proposant de monter sur le toit de celle-ci pour profiter d’une vue sur toute la médina.
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Article et photos par Alexandre Rosa